Commémorations du 8 mai 2025

Cette année, la France a célébré le 80e anniversaire de l’armistice du 8 mai 1945, marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe. Partout dans le pays, des cérémonies officielles, et des rassemblements ont eu lieu pour rendre hommage aux combattants et aux victimes du conflit, perpétuant ainsi la mémoire de cet événement fondateur de l’histoire contemporaine.

À Paris, la cérémonie nationale s’est tenue autour de l’Arc de Triomphe et sur les Champs Élysées, en présence du Président de la République. Le programme a débuté en fin d’après-midi avec un dépôt de gerbe devant la statue du général de Gaulle, suivi d’une revue des troupes et d’un discours présidentiel. Après le ravivage de la flamme du Soldat inconnu, la Patrouille de France a survolé la capitale, ponctuant l’hommage national d’un lâcher de fumigènes tricolores.

Dans toutes les régions, des cérémonies similaires ont été organisées, rassemblant autorités civiles et militaires, élus, associations d’anciens combattants et scolaires. Ces commémorations ont permis de transmettre la mémoire de la guerre et de ses sacrifices aux jeunes générations, tout en rappelant les événements marquants, comme le massacre de la Braconne en Charente ou les drames survenus en Algérie le 8 mai 1945.

Ce 8 mai 2025, la France entière s’est ainsi unie dans le recueillement et la célébration de la paix retrouvée, 80 ans après la capitulation de l’Allemagne nazie.

Du côté de Créancey…

Ce 8 mai 2025, à Créancey, la commémoration du 80e anniversaire de la libération des camps et de la signature de l’Armistice a revêtu un caractère particulièrement solennel. En effet, Madame la Maire, le Conseil municipal, les élèves, leurs enseignantes et notre association ont célébré ensemble cet événement.

Les élèves de grande section, accompagnés de leur maîtresse Mathilde Déchaux, ont créé et présenté des saynètes retraçant la vie des enfants dans un village rural pendant la Seconde Guerre mondiale : le départ du père, les pénuries, l’arrivée des réfugiés et la présence des résistants. Les plus jeunes, quant à eux, ont réalisé des dessins et écrit des poèmes.

Devant le monument aux morts, après avoir écouté le discours de Madame la Maire, les enfants ont chanté la Marseillaise, lu le poème « Liberté » de Paul Éluard, puis déposé quarante roses blanches devant les quarante noms inscrits sur le monument.

Parallèlement, notre exposition consacrée au camp de Dachau se tenait dans la salle de la mairie et a rencontré un vif succès. Les élèves de CM1 et CM2, accompagnés de Mathilde Déchaux, sont venus échanger autour de cette exposition.

Un verre de l’amitié a clôturé cette journée riche en souvenirs.

Françoise GINIER-POULET
Délégation Bourgogne

Françoise Ginier présentant notre expo aux jeunes
Les dessins des plus jeunes

Et dans le Maine-et-Loire

Lors de la cérémonie du 8 mai, date officielle de la victoire des forces alliées sur l’Allemagne nazie, marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous nous sommes réunis près du monument aux morts de Saint-Pierre-Montlimart, dans le Maine-et-Loire. Serge Quentin, maître de cérémonie, accompagné de l’harmonie du Val d’Evre, a conduit l’événement avec le soutien de dix associations d’anciens combattants de la région, ainsi que de l’Amicale de Dachau, que je représentais avec notre drapeau.

Monument aux morts à Saint-Pierre-Montlimart, 8 mai 2025, Serge Quentin, Sandra Quentin porte-drapeau de l’Amicale, le maire Christophe Dougé et la députée Nicole Dubré-Chirat.

Une première gerbe a été déposée par Christophe Dougé, maire de Montrevault-sur-Evre, suivie d’une seconde offerte par Nicole Dubré-Chirat, députée de la sixième circonscription. Quelques roses ont également été déposées par de jeunes enfants, symbolisant la transmission de la mémoire.

L’harmonie du Val d’Evre a résonné dans nos cœurs tout au long de la cérémonie, de la Marseillaise au Chant des marais. Une manière forte de perpétuer le souvenir et de repartir porteurs de l’espoir du « never again ».

Sandra QUENTIN

Journée nationale de la Déportation, 27 avril 2025

Message pour la Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation

Au printemps 1945, il y a 80 ans, la progression des armées alliées mettait progressivement un terme à ce qui fut l’univers concentrationnaire nazi. Depuis quelques années, le 27 janvier anniversaire de la libération d’Auschwitz, est devenu le symbole de la commémoration de la Shoah. Cependant cette date ne marqua ni le commencement ni le terme de la libération des camps. La fin des souffrances était encore éloignée pour tous les détenus en vie.

En effet, près de 300 000 détenus des camps de concentration périrent dans des conditions effroyables, soit plus du tiers de l’effectif encore présent dans les camps en janvier 1945. Le retour des déportés à la liberté ne peut être dissocié de ces épisodes d’évacuation, de ces « marches de la mort », ni des drames et massacres qui les ont accompagnés.

Lorsque leurs bourreaux les abandonnèrent et qu’ils furent enfin délivrés, ces déportés de toutes origines, résistants, opposants, persécutés portaient en eux les terribles séquelles des camps qui ne devaient plus les quitter. La liberté retrouvée sonnait aussi pour eux comme un abandon de leurs camarades morts en déportation.

Ce drame humain doit nous rappeler combien il est essentiel de défendre et de préserver les valeurs universelles de dignité, de liberté, de fraternité car la loi du plus fort risque, une fois encore, de bouleverser les équilibres mondiaux.

En rendant hommage à tous les Déportés en ce dernier dimanche d’avril, jour de commémoration nationale voulu par tous les survivants à leur retour, et à une période d’une singulière gravité où tout l’acquis du passé semble vaciller, nos générations qui n’ont pas connu l’horreur des camps doivent poursuivre le combat pour bâtir un monde de paix, de justice et de tolérance.

Ce message a été rédigé conjointement par la Fédération Nationale des Déportés et Internés, Résistants et Patriotes (FNDIRP) ; la Fondation pour la Mémoire de la Déportation (FMD) ; l’Union Nationale des Associations de Déportés, Internés et Familles de disparus – Fédération Nationale des Déportés et Internés de la Résistance (UNADIF – FNDIR) ; avec le concours des Associations de mémoire des camps.

Blois

Le 27 avril 2025, une cérémonie s’est tenue à Blois, en présence de nombreuses personnalités, des associations patriotiques, des porte-drapeaux, des enfants des écoles Marcel-Bühler, des familles des déportés du Loir-et-Cher, ainsi que de la chorale « Les Braciphonies ».

À cette occasion, l’exposition « Un nom, un visage », réalisée par la FNDIRP/ADIRP 41 et visible depuis le 22 avril, était présentée. Vingt-et-un portraits de déportés du département étaient ainsi révélés au public, accrochés aux grilles de la préfecture de Blois jusqu’au 12 mai 2025, permettant aux nombreuses familles invitées de rendre hommage à leurs proches.

La chorale a interprété la chanson « Nuit et Brouillard », ajoutant à la solennité du moment. Deux gerbes ont été déposées : la première, au nom de l’Amicale du camp de concentration de Dachau, par des enfants des écoles et des familles de déportés à Dachau ; la seconde, pour la FNDIRP/ADIRP 41, par la présidente accompagnée d’une fille de déportée et d’enfants.

La cérémonie s’est clôturée par un vin d’honneur au Conseil départemental, réunissant un public particulièrement nombreux, venu partager ce moment de mémoire et de recueillement.

Martine AUBRY-RIGNY

Cholet

En cette Journée nationale du souvenir des victimes de la déportation, dimanche 27 avril 2025 en fin de matinée, une cinquantaine d’élus, de membres d’associations, de citoyens et de lycéens se sont rassemblés sur la place Créac’h-Ferrari pour rendre ce traditionnel hommage aux victimes et aux survivants de la déportation, en présence des autorités et des élus. Cette cérémonie, instaurée le 14 avril 1954 à la demande des déportés, commémore la mémoire de ceux qui ont perdu la vie en déportation.

Serge Quentin, vice-président de l’Amicale de Dachau, a lu le message officiel des associations, aux côtés de Gilles Bourdouleix, maire de Cholet, Corine Minot, sous-préfète de l’arrondissement de Cholet, André Augé, président de la Médaille militaire à Cholet, et François Michel Soulard, président du Souvenir Français.

Cette belle cérémonie, à la fois sobre et émouvante, a rappelé l’importance de défendre et de préserver les valeurs universelles de dignité et de liberté.

Les lycéens de l’établissement Fernand Renaudeau ont lu les noms des 56 déportés du Choletais, entourés d’une dizaine de porte-drapeaux fidèles à ces commémorations.

Les autorités se sont ensuite avancées au pied du monument dédié aux déportés juifs du Choletais, en présence de M. Bertrand Bossy, historien de la déportation des juifs dans les Mauges, pour y déposer les traditionnelles gerbes.

Pour rappel, la Médaille militaire, reconnaissable à ses bandes jaune et verte, a été créée par Louis-Napoléon en 1852. Elle constitue la deuxième distinction des ordres nationaux, juste après la Légion d’honneur, et porte la devise « Valeur et Discipline ».

Sandra QUENTIN

Cholet, place Créac’h-Ferrari, dimanche 27 avril 2025

Dijon

« C’est d’une importance capitale d’être présent ici aujourd’hui. »
Paroles d’un jeune porte-drapeau

France 3 Bourgogne a suivi la cérémonie qui s’est tenue au square Debeaumarchais (Dijon) ce 27 avril.

Après la lecture de textes et les discours des autorités présentes, des fleurs ont été distribuées à tous les participants, puis déposées en silence en hommage aux déportés. Ces fleurs, toutes différentes, symbolisaient la diversité des personnes déportées dans les camps.

Henri Mosson, 101 ans, ancien déporté NN au Struthof, était présent. Il témoigne :

« J’ai été déporté dans ma prime jeunesse, j’ai été condamné à mort ici, à Dijon, mais je n’ai pas été fusillé. J’ai été considéré comme un ennemi. »

Des jeunes étaient également présents, comme Timéo Hudelot, porte-drapeau pour l’Association nationale des sous-officiers de réserve de l’armée de l’air et de l’espace 21, qui estime sa présence indispensable :

« Cette sombre période de l’Histoire, il ne faut jamais oublié qu’elle a existé. »

Thomas Bidault, membre du CNSRD et de l’association Histoire au présent, ajoute :

« On a un rôle déterminant à jouer pour faire vivre cette mémoire, réfléchir à de nouvelles façons de transmettre les mémoires pour tous les jeunes. »

En Côte-d’Or, 962 personnes ont été déportées, dont 489 ne sont jamais revenues. Les associations de résistants et de déportés s’engagent pour que cette histoire soit transmise aux jeunes générations.

(Extrait d’articles de A. Cochet et G. Robin, France 3 Bourgogne Franche-Comté)

Françoise GINIER-POULET
Délégation Bourgogne

Narbonne

« La plus belle des sépultures des morts, c’est la mémoire des vivants. » Ces quelques mots de Malraux résument tout. Mais encore faut-il qu’ils continuent à résonner haut et fort dans la mémoire des vivants…

Ce matin du 27 avril, personne ne manquait à la stèle des Martyrs de la Résistance et de la Déportation à Narbonne. Toutes les autorités civiles et militaires étaient représentées pour écouter un texte à plusieurs voix, rédigé après de longues heures de réflexion par les élèves de CM2 du collège Sévigné. Ces enfants ont su saisir bien des messages, comprendre bien des choses, dans un contexte où l’actualité ravive les démons du passé.

Les discours habituels ont suivi, rappelant le courage, la solidarité, la résistance, la tolérance et le respect, dans cette prière laïque : « Que la jeune génération poursuive le combat pour construire un monde de paix, de justice et de tolérance. » Le temps était clément et, avec ces derniers mots, le soleil est apparu.

Christiane DE LA TEYSSONNIÈRE

Paris

Ravivage de la Flamme sous l’Arc de Triomphe

Voilà la deuxième année consécutive que l’Amicale de Dachau ravive la Flamme sous l’Arc de Triomphe, non plus le 29 avril — date anniversaire de la libération du camp de Dachau — mais le dernier dimanche d’avril, qui correspond à la Journée nationale du souvenir des victimes et des héros de la déportation. Ce changement, désormais inscrit dans une « nouvelle tradition », ne doit pas être perçu comme une rupture, mais plutôt comme une adaptation permettant à l’Amicale française d’être présente à Dachau lors des commémorations de la libération du camp.

Cette année encore, la cérémonie s’est déroulée en présence de madame Patricia Mirallès, secrétaire d’État chargée de la mémoire et des anciens combattants, ainsi que de nombreux officiels et représentants d’associations mémorielles. Plus d’une dizaine de gerbes ont été déposées en hommage aux victimes et aux héros de la déportation. L’Amicale de Dachau était représentée par sa vice-présidente, Joëlle Delpech-Boursier, accompagnée de quelques adhérents.

Ce moment solennel, empreint d’émotion et de recueillement, rappelle l’importance de transmettre la mémoire et de perpétuer l’hommage à celles et ceux qui ont souffert et combattu pour la liberté. Par cette présence fidèle, l’Amicale de Dachau réaffirme son engagement à faire vivre le souvenir et à sensibiliser les générations futures à l’histoire et aux valeurs de la Résistance.

Exposition « Mémoires de déportations : témoignages d’hier, regards d’aujourd’hui »

Du 11 mars au 30 avril 2025, les passants ont pu découvrir sur les grilles de l’Hôtel de Ville de Paris (rue de Rivoli) l’exposition « Mémoires de déportations : témoignages d’hier, regards d’aujourd’hui ». Fruit d’une collaboration entre l’Union des associations de mémoire des camps nazis (UAMCN), la Ville de Paris et plusieurs associations partenaires, dont l’Union des Déportés d’Auschwitz et l’Amicale de Bergen-Belsen, cette exposition proposait un parcours poignant à travers vingt panneaux. Chacun des dix camps était représenté par deux panneaux : l’un exposant des dessins réalisés par des déportés durant leur internement ou peu après leur libération, l’autre montrant des photographies contemporaines des mémoriaux érigés sur ces sites historiques.

L’inauguration s’est faite en présence de personnalités telles que Laurence Patrice, adjointe à la maire chargée de la mémoire, Aurélie Filipetti, directrice des Affaires culturelles, ainsi que des représentants d’associations et de la mairie. Ce moment a permis de rappeler à la fois la singularité de chaque camp et la brutalité systémique imposée par les SS à des hommes et des femmes venus de toute l’Europe. Dix dessins, autant de regards sur l’expérience concentrationnaire, et dix photographies, qui invitent à réfléchir à notre rapport à ces lieux de mémoire, quatre-vingts ans plus tard. Les panneaux de l’exposition sont consultables en ligne sur le site de la Ville de Paris (https://www.paris.fr/evenements/memoires-de-deportations-temoignages-d-hier-regards-d-aujourd-hui-81519).

Programme d’échanges mémoriels à l’occasion du 80e anniversaire de la libération du camp de concentration du Mühldorf Hart

Le complexe de camps de concentration extérieurs de Mühldorf am Inn était un groupe de camps parmi les 169 camps extérieurs du camp de concentration de Dachau. Il a été construit à l’été 1944 et dirigé par la SS.

Avec le complexe de camps de concentration extérieurs de Kaufering et le complexe de camps de concentration extérieurs de Munich-Allach (BMW), le complexe de camps de concentration extérieurs de Mühldorf faisait partie des trois plus grands camps de concentration extérieurs du camp principal de Dachau.

Les détenus de ces camps étaient contraints de travailler dans les environs de Mühldorf. Une grande partie d’entre eux étaient alors employés à l’extérieur des camps, principalement dans l’agriculture et le bâtiment.

Sur le chantier du projet portant le nom de code « Weingut I », où devait être construit un bunker d’armement pour la production de composants du chasseur à réaction Me 262 de Messerschmitt, les détenus du camp de concentration représentaient la moitié des travailleurs forcés.

Outre les camps de concentration, il existait dans les environs de Mühldorf plusieurs camps de travail de l’Organisation Todt ainsi que des camps de travailleurs étrangers. Ceux-ci ne dépendaient certes pas du camp de concentration de Dachau, mais étaient généralement affectés à des projets de construction similaires.

Le nombre de détenus ayant réellement transité par les camps du complexe de camps extérieurs de Mühldorf ne peut plus être prouvé avec certitude.

La brochure publiée en 2018 par la Fondation des mémoriaux bavarois sur le mémorial du Mühldorfer Hart indique que sur les 7221 détenus du camp de concentration – comme indiqué dans les documents historiques incomplets – le plus souvent de confession juive, qui ont travaillé dans le camp de juillet 1944 à avril 1945, les Français avec 437 détenus représentaient le quatrième groupe national le plus important, après les 4568 Hongrois, qui représentaient plus de 60 % du nombre total de détenus, les 691 Polonais et les 455 Lituaniens.

Le nombre de morts varie selon les sources, mais il est probablement de l’ordre de 4000 personnes, qui sont mortes de maladies, de faim et de la dureté dévastatrice du travail.

Un détenu survivait en moyenne 80 jours.

Parmi les 437 détenus français, au moins 120 sont morts en captivité.

Le destin a voulu que la grande majorité des déportés français soient des résistants des maquis des Vosges, arrêtés par la Gestapo, et d’abord déportés à Dachau comme prisonniers NN, avant d’être détachés fin octobre 1944 auprès de l’Organisation Todt pour travailler à la construction du bunker du Mühldorfer Hart.

Ils ont été logés en partie dans le camp d’internement de Mettenheim (baraques en bois) et en partie dans le camp d’internement (tentes en partie enterrées) dans la forêt du Mühldorfer Hart.

De nombreux monuments d’honneur et commémoratifs, des stèles et des plaques ont été érigés après la fin de la Seconde Guerre mondiale dans le département des Vosges, dans la Région Grand Est, partout où il y eut des maquis.

Chaque année, des commémorations sont organisées en présence des élus, des représentants de l’État et des membres des familles de victimes, avec un écho médiatique toujours assez important.

La Résistance et la Déportation continuent d’occuper une place importante dans le travail de mémoire en France, ce qui est souvent peu connu du public allemand.

Le dernier survivant français du camp de concentration du Mühldorfer Hart, Roland Thomas (1921-2023), résistant du maquis de Grandrupt-de-Bains, est décédé en juillet 2023 dans sa 102e année. Toute sa vie, en tant que témoin, il a raconté aux élèves du département des Vosges ce qu’il avait vécu dans le camp de concentration de Mühldorf.

Jusqu’à ce que le délégué du Souvenir Français pour la Bavière parle de ce survivant français, encore en vie en avril 2022, dans le discours qu’il prononça lors de la commémoration du 78e anniversaire de la libération du camp de concentration du Mühldorfer Hart, les acteurs du travail de mémoire dans le Landkreis de Mühldorf ne savaient rien de l’existence de monsieur Thomas.

Inversement, monsieur Thomas et de nombreux autres survivants ne savaient rien du mémorial du camp de concentration de Mühldorf Hart ni de l’exposition permanente sur ce camp dans le Musée de Mühldorf. Certes un groupe de survivants du département des Vosges s’est rendu en 1980 à Mühldorf après être passé par Dachau et a eu du mal à trouver des traces du camp, dont les ruines disparaissaient à l’époque sous la végétation sauvage. Mais ni les derniers survivants ni leurs descendants ne connaissaient l’importance du travail de mémoire effectué ces dernières années dans le Landkreis.

Dans le département des Vosges, le nom de Mühldorf est malheureusement exclusivement associé à l’ancien camp de concentration du Mühldorfer Hart et à ses atrocités.

Afin de favoriser une connaissance mutuelle entre les descendants des victimes vosgiennes et les acteurs du travail de mémoire à Mühldorf, Munich et Dachau, Pierre Wolff, délégué du Souvenir Français pour la Bavière à Munich, a initié, avec le soutien de l’Amicale du camp de concentration de Dachau à Paris, un programme d’échanges mémoriels à l’occasion du 80e anniversaire de la libération du camp de concentration du Mühldorf Hart.

Après le décès du dernier survivant français, les descendants des victimes du camp de concentration (enfants – eux-mêmes par nature souvent très âgés – petits-enfants, arrière-petits-enfants, nièces et neveux, petites-nièces et petits-neveux) sont porteurs des témoignages de leurs ancêtres, parmi lesquels beaucoup s’engagent dans le travail de mémoire.

Les rencontres, visites et échanges mémoriels franco-bavarois qui ont eu lieu du 30 avril au 2 mai 2025 ont été rendus possibles grâce aux mesures suivantes :

  • Participation à la cérémonie commémorative au mémorial du camp de concentration de Mühldorfer Hart ave une prise de parole de Laurence Steinmetz, petite-fille du dernier survivant français, aux côtés de la petite-fille de Max Mannheimer, victime juive allemande de Dachau et de Mühldorf, figure emblématique des victimes de Dachau et du travail de mémoire en Bavière
Laurence Steinmetz, petite-fille de Roland Thomas
© Société Montgelas (Munich/Paris) – Photos: Thomas Bauer (Mühldorf a. Inn) – tom-bauer-foto.de – mai 2025
  • Visite des principaux lieux du mémorial du camp de concentration du Mühldorfer Hart (camp enterré dans la forêt / fosse commune / ruine d’une arche de bunker) ainsi que de l’exposition « Alltag, Rüstung, Vernichtung – Der Landkreis Mühldorf im Nationalsozialismus » (Quotidien, Armement, Anéantissement – Le Landkreis de Mühldorf sous le régime national-socialiste) au Centre d’histoire du Musée de Mühldorf am Inn
Seul vestige d’arche en béton des bunkers construits par les détenus du camp pour le projet de construction d’avions decombat de l’entreprise Messerschmitt / © Société Montgelas (Munich/Paris) – Photos: Thomas Bauer (Mühldorf a. Inn) – tom-bauer-foto.de – mai 2025
Exposition « Alltag, Rüstung, Vernichtung – Der Landkreis Mühldorf im Nationalsozialismus » / © Société Montgelas (Munich/Paris) – Photos: Thomas Bauer (Mühldorf a. Inn) – tom-bauer-foto.de – mai 2025
  • Plantation d’un arbre en signe de paix et de fraternité et installation d’un panneau bilingue informatif et mémoriel sur les victimes lorraines dans le cimetière des camp de concentration extérieurs de Mühldorf, où reposent 480 victimes
Dévoilement de l’arbre récemment planté
Le panneau bilingue mémoriel / © Société Montgelas (Munich/Paris) – Photos: Thomas Bauer (Mühldorf a. Inn) – tom-bauer-foto.de – mai 2025
  • Rencontre avec des acteurs institutionnels et privés du travail de mémoire à Mühldorf, Munich et Dachau et participation au premier forum des descendants organisé par le mémorial du camp de concentration à Dachau et le Comité International de Dachau
Au siège du Parlement de Bavière (© Christian Grégoire)
Au forum des descendants, à Dachau (© Christian Grégoire)
  • Échanges avec les enseignants et les élèves des classes de français du Lycée Ruperti de Mühldorf, déjà partenaires du projet pilote « Se souvenir en français – Sur les traces des maquisards vosgiens » initié par Le Souvenir Français en 2023, et qui ont participé activement aux différentes étapes duk séjour de la délégation française le 1er mai à Mühldorf

Pierre WOLFF
Délégué général adjoint du Souvenir Français d’Allemagne pour la Bavière

Le séjour a été organisé par la délégation du Souvenir Français d’Allemagne pour la Bavière et la société Montgelas pour la promotion de la coopération franco-bavaroise (Munich), avec le concours de l’Amicale de Dachau et le soutien financier du Fonds citoyen franco-allemand.

80e anniversaire de la libération du camp de Dachau

Quatre jours commémoratifs ont été nécessaires pour honorer ce 80e anniversaire, du jeudi 1er au dimanche 4 mai 2025. Dès le jeudi, le Mémorial accueillait les premiers participants, et le Comité International de Dachau (CID) était présent à la cérémonie avec dépôt de gerbe au kommando de Mühldorf, chargé de la construction d’abris aériens dans les bois. Sous l’égide du Souvenir français et avec la collaboration d’un groupe (essentiellement) vosgien, la mémoire de ce lieu et de ses victimes a pu être honorée, ouvrant ainsi le temps cérémonial de ce 80e pèlerinage.

Le vendredi 2 mai a été marqué par un forum des descendants, réunissant des représentants de toutes les nations ainsi que du mémorial KZ-Gedenkstätte Dachau et de la fondation bavaroise Stiftung Bayerische Gedenkstätten. Des mots de bienvenue ont été prononcés par Dominique Boueilh, président du CID, Gabrielle Hammermann, directrice du Mémorial de Dachau, et Karl Freller, directeur de la Fondation des mémoriaux bavarois, nous invitant à échanger entre nations.

Nous avions été sollicités pour préparer des biographies de déportés issus de nos familles respectives, au format A3, afin de les afficher sur des panneaux prévus à cet effet. Le CID et l’Amicale de Dachau avaient également créé des kakemonos pour une meilleure visibilité lors de cet événement. Des livres et des témoignages, consultables dans toutes les langues, ont permis de faire émerger une véritable synergie mémorielle.

À l’occasion de ce forum, nous avons assisté à une table ronde réunissant des enfants de déportés, qui ont relaté l’impact douloureux des camps de concentration. Étaient présents deux enfants de déportés allemands : Ernst Mannheimer, fils de Max Mannheimer, et Helmut Wetsel, psychologue, fils d’Otto Wetsel. Georg Smirnov, arrière-petit-fils du prisonnier de guerre soviétique assassiné Grigorij Dmitriewitsch Smirnow, a pris la parole pour évoquer la vie de son arrière-grand-père et s’exprimer au nom du Centre de documentation sur le nazisme de Cologne.

Monsieur Leslie Rosenthal, fils de Mirjam Rosenthal, a raconté l’arrivée de sa mère enceinte au camp externe de Landsberg-Kaufering, contrainte de dissimuler sa grossesse autant que possible, subissant affronts, violences et insultes, avant de donner naissance à ce bébé de Kaufering dans des conditions extrêmes. Son récit fut particulièrement émouvant, marqué par un moment de silence respectueux.

Nous avons également écouté Dominique Boueilh, président du CID et fils de Didier Boueilh, témoigner de l’histoire de son père et de l’impact multiforme de cette expérience sur ses enfants et petits-enfants, soulignant la singularité de chaque parcours familial face à un tel drame. Pour animer cette riche table ronde, madame Gabrielle Hammermann, directrice du Mémorial de Dachau, accompagnée de la journaliste Nora Hespers, a ouvert le dialogue à chacun, avant de laisser place à quelques questions du public.

Forum des descendants, Dominique Boueilh, Serge, Danielle et Sandra Quentin
Table ronde au Mémorial

Dans la continuité de cette journée particulièrement dense, des éclaircies ensoleillées nous ont accompagnés jusqu’au calvaire de Leitenberg, où nous avons retrouvé Florian Hartmann, maire de Dachau, ainsi que Dominique Boueilh, président du CID et de l’Amicale de Dachau, pour les discours. Le dépôt de gerbe, quant à lui, a été conduit par Serge Quentin, vice-président de l’Amicale de Dachau et membre actif du CID.

Calvaire de Leitenberg

Puis, nous avons poursuivi le pèlerinage vers le Waldfriedhof afin d’y déposer une gerbe au pied du monument. À cette occasion, un groupe de descendants de libérateurs américains nous a remis à chacun un petit gâteau gaufrette, symbole de douceur, estampillé au 80e anniversaire de la libération du camp. Leur discours et leur attention ont été salués par l’ensemble des participants à cette cérémonie, et nous les remercions une fois encore pour leur délicatesse et ce témoignage très touchant. Nous avons terminé la cérémonie au pied du monument par le Chant des marais, repris par l’ensemble des participants dans une grande solennité.

Monument aux morts, Waldfriedhof

Le lendemain, nous avons débuté la journée par l’Assemblée Générale, au programme dense, présidée par Dominique Boueilh, assisté de Cristina Cristobal, secrétaire générale du CID. Les différents rapports et l’avancement des groupes de travail ont été évoqués, dans l’ultime but de promouvoir la transmission de la mémoire.

Cette année, nous avions l’honneur d’accueillir les déportés George Legmann, Abba Naor et Jean Lafaurie. À l’issue de cette réunion, Cristina Cristobal et Jean-Michel Thomas ont organisé la remise du prix André Delpech à Florian Hartmann, maire de Dachau, et à la 42e US (Rainbow) Division. La 45e US Division recevait quant à elle le prix d’Honneur et la reconnaissance du CID. Deux libérateurs américains étaient venus spécialement pour cet événement.

Nous étions nombreux à saluer le courage et l’engagement de ces personnalités, et à féliciter monsieur Hartmann pour son dévouement et sa fidélité lors de toutes les commémorations à Dachau, ainsi que les deux majors généraux américains représentant les 45e et 42e délégations lors de la libération du camp le 29 avril 1945.

C’est avec beaucoup de soin que notre général français, ancien président du CID, Jean-Michel Thomas, a orchestré cette remise de prix en présence des vétérans et des officiers américains. Ces distinctions ont été remises par Dominique Boueilh et Joëlle Delpech-Boursier, fille du général André Delpech, accompagnée de sa famille – enfants, nièce et petits-enfants – que nous remercions chaleureusement pour leur présence.

Ce fut une belle démonstration de la transmission mémorielle, qui honore toute la notoriété de ce prix. La rencontre des trois déportés présents (Brésil, Israël, France) et des deux libérateurs américains fut un moment unique et fort, que nous avons partagé à la Mairie de Dachau, où les échanges ont pu se poursuivre autour d’un buffet de l’Amitié.

Mairie de Dachau

L’après-midi, nous nous sommes rendus à l’Appelplatz, où nous ont rejoints les 45e et 42e délégations américaines ainsi que leurs majors généraux, accompagnés de Jean Lafaurie, 101 ans, déporté français, et d’un libérateur américain. Tous deux ont tenu à rester debout pendant toute la durée de la cérémonie et du dépôt de gerbe, afin d’honorer leurs camarades respectifs.

Lors de ce temps commémoratif, Joëlle Delpech-Boursier, accompagnée de sa fille Alice et de sa belle-fille Elisabeth, a lu un extrait de son livre Avoir vingt ans à Dachau pour évoquer le jour de la Libération, le 29 avril 1945.

Devant le monument « Never Again », les deux majors généraux américains, le général Jean-Michel Thomas, et le président du CID Dominique Boueilh, ont salué tous les prisonniers. Ils ont ensuite été rejoints par Jean Lafaurie et le libérateur américain pour une photo unique, 80 ans après la Libération.

Appelplatz
Dominique Boueilh, général Jean-Michel Thomas, Jean Lafaurie, Joëlle Delpech-Boursier, majors généraux américains, libérateur américain, Cristina Cristobal

Puis, nous sommes allés à Herbertshausen, un ancien champ de tir où 4000 à 4500 prisonniers de guerre de l’ex-Union soviétique ont été assassinés entre septembre 1941 et juin 1942. Le champ de tir de Herbertshausen faisait partie des nombreux lieux d’extermination nazis, où ils ne se contentaient pas de s’entraîner au tir. Il s’avère que, sur les 5,7 millions de soldats soviétiques faits prisonniers par les Allemands avant le printemps 1943, 3,3 millions furent assassinés jusqu’en mai 1945. Après les Juifs, ils furent les plus touchés par le terrorisme nazi, selon les mots d’Ernst Grube, survivant de la Shoah et président de la Communauté des anciens déportés de Dachau (Lagergemeinschaft Dachau e.V.). Il a terminé son discours en appelant à un temps et à une politique de paix, conformément à la Charte de l’ONU de 1945.

Ensuite, Franziska Sessler, membre du présidium de la Lagergemeinschaft Dachau, a pris la parole. Elle est l’arrière-petite-fille de deux résistants, Lina et Alfred Haag, et se présente comme membre de la quatrième génération après-guerre. Ses arrière-grands-parents étaient impliqués dans la résistance et ont survécu à onze années de torture. Ils en ont fait leur mission principale et ont continué à s’engager après leur libération. Dans son livre, Lina Haag adresse une lettre d’amour à son mari Alfred en 1947, où elle décrit onze ans de souffrance et de résistance, « une poignée de poussière ». Elle est décédée à l’âge de 105 ans, après avoir consacré sa vie à témoigner et à poursuivre la résistance. Quant à Alfred Haag, il s’est engagé après la guerre, est devenu président de la WN-BdA bavaroise et membre du Comité International de Dachau, tout en témoignant dans les écoles. Franziska Sessler poursuit aujourd’hui la mission de ses arrière-grands-parents en siégeant au présidium.

Enfin, nous avons applaudi le discours de Marine de France, bénévole à l’église protestante de la Réconciliation et au Dachauer Forum dans le cadre de son service civique. Elle a promu la paix et la pédagogie de la transmission de la mémoire, afin de préserver l’histoire.

Herbertshausen

Nous avons poursuivi le pèlerinage vers le Mémorial des marches de la mort, où nous avons retrouvé, comme chaque année, le maire de Dachau, Florian Hartmann. En cette veille de la cérémonie de la Libération, il a rappelé l’horreur de cette marche organisée par les SS, quelques jours avant la libération, au cours de laquelle de nombreux prisonniers d’Auschwitz sont morts d’épuisement ou ont été tués.

Le Mémorial des marches de la mort, érigé il y a 25 ans par Hubertus von Pilgrim à Dachau, marque, selon lui, le point final du système de terreur nazi. Il insiste sur la nécessité de ne pas oublier ces événements et de rester vigilants face au racisme et à l’antisémitisme.

Il a salué la 42e division américaine, le CID, ainsi qu’Andrzej Kacorzyk, directeur adjoint du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Noémie Hernandez-Bernard, bénévole ASF dans le cadre de son service civique à l’Église évangélique de la Réconciliation, qui prendront la parole juste après son intervention. Un mot de remerciement a également été adressé aux représentants politiques du Land, du Kreis, de la ville, du CID, ainsi qu’aux délégations officielles des villes jumelées de Dachau, Fondi et Léognan, sans oublier les communes amies d’Oradour-sur-Glane et d’Oswiecim, invitées pour ces commémorations.

Il a ensuite passé la parole à Andrzej Kacorzyk, qui a décrit les conditions épouvantables de cette marche de la mort depuis les camps d’Auschwitz I, de Birkenau et de Monowitz, où 56000 prisonniers furent conduits vers Wodzislaw Slaski pour certains, et vers Gleiwitz pour d’autres, sur plus de 60 kilomètres. Entre 9000 et 15000 prisonniers ont perdu la vie par épuisement, par le froid, sous les coups, ou ont été assassinés.

Rappelons d’ailleurs les conditions météorologiques rudes de l’hiver 1944-1945, avec ses fortes gelées et ses températures négatives, qui ont entraîné des conditions extrêmes, mais n’ont pas empêché des tentatives d’évasion tout au long du parcours. Certaines personnes ont témoigné, comme les prisonnières Krystyna Zywulska, Olga Lengyel et Seweryna Szmaglewska, qui ont survécu et laissé des écrits devenus célèbres : J’ai survécu à Auschwitz (K. Zywulska), Cinq cheminées (O. Lengyel), Fumée au-dessus de Birkenau (S. Szmaglewska).

De nombreux prisonniers ont été tués lors de leur tentative d’évasion, mais quelques-uns ont pu être aidés par des familles qui risquaient leur vie. Ces familles ont plus tard été honorées par l’Institut Yad Vashem, qui leur a décerné la médaille des Justes parmi les Nations.

Le discours fut ponctué de passages évoquant les symboles de mémoire déposés lors d’un pèlerinage, tels que des bougies et des fleurs, qui rappellent ce que la mémoire peut nous apporter. En reprenant ces mots : « La mémoire nous guide », « la mémoire nous enseigne », « la mémoire nous rend conscients », « la mémoire est douloureuse », « la mémoire est préventive », « la mémoire nous oblige ».

Puis, c’est au tour de Noémie Hernandez-Bernard, 19 ans, volontaire pour ASF – Action Réconciliation Service pour la Paix – à l’église de la Réconciliation du Mémorial du camp de Dachau, de prendre la parole en français et en allemand pour faire part de son expérience et de ses rencontres au sein du Mémorial. Elle déclare, je cite : « Je porte désormais en moi les voix de celles et ceux que j’ai rencontrés, mais aussi celles de tous ceux qui n’ont jamais pu témoigner. » Elle a eu la chance de rencontrer Jean Lafaurie quelques mois auparavant. Grand défenseur de la France et déporté à Dachau, il était lui-même présent lors de cette journée commémorative, au cours de laquelle elle a récité le poème « L’insomnie », extrait du recueil Esquisses poétiques de Jean Lafaurie.

L’insomnie

Des images défilent sur l’écran de mes nuits
Empêchant le sommeil de vaincre l’insomnie.
Les portes de l’enfer se ferment pour Morphée
Mais s’entrouvrent pour moi sur un triste passé.
Il a laissé sur moi des marques indélébiles
Rendant pour moi l’oubli quasiment impossible.
D’abord, parler d’oubli, ce serait trahison,
Car j’ai laissé là-bas mes meilleurs compagnons.
Comme moi, ils étaient résistants convaincus
Et nos résolutions étaient dans l’absolu.
On croyait en la France, c’était notre support
C’est pourquoi on nous a déportés vers la mort.
Le destin fait parfois des choix inexpliqués,
Eux sont restés là-bas, moi j’ai été sauvé.
Ils sont morts en pensant qu’ils seraient les derniers,
Que la leçon servirait à toute l’humanité.
Tel Phénix s’ils pouvaient renaître de leurs cendres,
Ils viendraient, c’est certain, crier d’indignation
De voir autant d’humains aujourd’hui se pourfendre
Pour des questions d’ethnie ou bien de religion.

Jean Lafaurie, Neste, 23 septembre 1993

Monument des marches de la mort
Maires de Fondi, Léognan, Oradour-sur-Glane, Oswiecim, avec Florian Hartmann, maire de Dachau,
Noémie Hernandez-Bernard avec Jean Lafaurie

Dans la soirée, le dîner réunissait les membres du CID et les membres de la délégation américaine. Nous avons eu l’opportunité de visionner un reportage réalisé par Antony Penrose, fils de Lee Miller, présent parmi nous. Nous y avons découvert les photographies prises par sa mère le jour de la libération du camp de Dachau. Le film Lee Miller, réalisé en 2023 par Ellen Kuras, retrace la vie de Lee Miller, interprétée par l’actrice Kate Winslet, et son combat pour dévoiler la vérité.

Les cérémonies dominicales ont débuté au crématorium, comme chaque année, grâce à l’étroite collaboration du maître de cérémonie Serge Quentin, responsable du protocole des commémorations. Elles ont suivi le culte œcuménique au carmel Heilig Blut, la messe orthodoxe russe à la chapelle de la Résurrection, ainsi que la commémoration de la Fédération régionale des communautés religieuses israélites de Bavière devant le monument juif.

Cette année, la cérémonie au crématorium s’est déroulée en comité plus restreint : seuls les membres du CID et les autorités étaient autorisés à y assister, afin de préserver le recueillement nécessaire dans ce lieu chargé d’histoire et porteur du message « Never again ».

Tous les drapeaux des nations représentées dans le camp de Dachau formaient une haie d’honneur, portée par les jeunes du lycée de Dachau. Après de nouveaux discours, le cortège s’est mis en marche, précédé du Livre des Morts porté cette année par Arthus Haulot, suivi des porte-drapeaux, des déportés présents et des autorités, traversant l’allée centrale du camp jusqu’au grand chapiteau de l’Appelplatz. La traversée du camp, sous la pluie, s’est effectuée au son des cloches et pouvait être suivie sur des écrans géants installés sous le chapiteau, permettant à ceux qui ne pouvaient se rendre au crématorium de participer à la cérémonie.

Les discours des autorités allemandes ont ensuite débuté, avec le mot de bienvenue de Gabrielle Hammermann, directrice du Mémorial de Dachau, suivi de Karl Freller, directeur de la Fondation des mémoriaux bavarois, et de Dominique Boueilh, président du Comité International de Dachau. Nous avons ensuite écouté Julia Köckner, présidente du parlement fédéral allemand, Bud Gahs, représentant des libérateurs et vétéran des troupes américaines, ainsi que les témoignages de Jean Lafaurie, Abba Naor et Leslie Rosenthal. Ulrike Scharf, ministre de la Famille, du Travail et des Affaires sociales de l’État de Bavière, et Ilse Aigner, présidente du parlement bavarois, ont également pris la parole.

Nous remercions le Quatuor du Jewish Chamber Orchestra de Munich, qui a accompagné les transitions entre les discours et les témoignages.

Un hommage aux anciens déportés décédés dans l’année a été rendu par Joséphine Hildinger et Clea Schendel, en service civique culture et éducation au Mémorial de Dachau, suivi d’une minute de silence.

Nous avons ensuite été invités à nous recueillir auprès des gerbes préalablement déposées, en commençant par les autorités, puis nation par nation. Nous avons chanté le Chant des marais, accompagné par le clairon, avant de nous incliner et de nous recueillir en mémoire de tous les déportés qui ont donné leur vie pour notre liberté.

Sandra QUENTIN