Visite du Centre de documentation sur l’histoire du national-socialisme

Munich, 29 avril 2023

Dans la matinée du samedi 29 avril, les membres de l’Amicale française de Dachau ont visité le Centre de documentation sur l’histoire du national-socialisme (NS-Dokumentationszentrum München) en compagnie de deux guides francophones.

Ouvert au public en avril 2015, à l’occasion du 70e anniversaire de la libération de Munich, ce fabuleux musée fournit des explications détaillées sur la création et l’accession au pouvoir du régime nazi, ainsi que sur ses suites et sur les orientations futures de la société. C’est donc un lieu d’enseignement historique, mais aussi de questionnement politique résolument tourné vers le futur.

Le musée est implanté à un endroit particulièrement symbolique. Tout d’abord, parce que c’est à Munich que fut fondé le parti national-socialiste, et que cette ville en resta le siège jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Plus précisément encore, parce que le musée se situe à l’emplacement même où se trouvait la « maison brune », le quartier général du parti nazi, presque entièrement détruit par les bombardements alliés. Ses ruines avaient finalement été enlevées en 1947, laissant le terrain vacant jusqu’en 2011, année à laquelle le chantier du musée débuta.

À l’intérieur, ce sont quatre étages d’apprentissage historique, dont un étage dédié aux expositions temporaires et trois étages réservés à l’exposition permanente. C’est cette dernière que nos guides nous ont fait parcourir pendant presque deux heures. Deux heures denses en informations, et qui pourtant auront laissé un goût de trop peu à une grande partie d’entre nous, tant nos conférencières, passionnantes, avaient à dire sur le sujet !

Composée de panneaux illustrés grands formats, mais aussi de nombreuses ressources multimédias pour une étude plus approfondie des thématiques et éléments abordés sur les panneaux, il est vrai que l’exposition permanente mériterait presque une journée complète de visite. Mais pour nous, nouveaux visiteurs, ce fut une première approche déjà très enrichissante.

Avec pour support ces grands panneaux dévoilant des photos et des documents d’époque, nos guides nous ont entraînés dans un parcours chronologique, couvrant dans un premier temps la période 1918-1933 afin de nous présenter le contexte social et politique particulier qui permit au parti nazi, dans un premier temps marginal, de devenir un parti de masse.

C’est ainsi que nous remontons à la fin de la Première Guerre mondiale et à la naissance de la république de Weimar, qui succède au IIe Reich dans un climat politique et économique extrêmement troublé. Une partie de la population et certains politiques s’indignent alors de la signature du traité de Versailles, qu’ils jugent humiliante. Désarmée et contrainte à payer de lourdes indemnités aux nations alliées, l’Allemagne souffre sur le plan économique et social, et les conséquences ne se font pas attendre : les communistes tentent une révolution en 1919, puis l’extrême droite un coup d’état en 1920.

Dans ce contexte, un certain Adolf Hitler, vétéran de la Première Guerre mondiale mais parfait inconnu, apparaît sur la scène politique. En 1919, il entre au parti ouvrier allemand (DAP), où il se fait très rapidement remarquer pour ses talents d’orateur. C’est également un excellent organisateur, et il multiplie les meetings de ce petit groupuscule qui, en quelques mois, devient sous son impulsion un véritable parti politique doté d’un programme.

Rebaptisé « Parti national-socialiste des travailleurs allemands » (NSDAP) le 24 février 1920, celui que nous appelons plus communément « parti nazi » est né. Et tout en s’adressant aux citoyens allemands issus de toutes classes, il affiche clairement ses intentions : ouvertement racistes, antisémites, antidémocratiques, antimarxistes, belliqueux et revanchards, ses membres rêvent de rendre à l’Allemagne sa grandeur. Et cela passe nécessairement par l’abrogation du traité de Versailles.

Encouragé et soutenu par les cercles nationalistes et antisémites de Munich, le parti nazi affiche un programme apte à séduire un peuple allemand dérouté par la défaite et accablé par les sanctions économiques. Mais, à ses débuts, ce mouvement réactionnaire et marginal s’oppose encore à un Munich libéral et démocratique.

Mais les années passent et le parti prospère. Hitler évince ses dirigeants et se rapproche des hautes sphères munichoises…

À l’automne 1923, la Bavière est au bord de la rupture avec Berlin. Les 8 et 9 novembre, Hitler profite du climat politique tendu pour tenter de s’emparer du pouvoir avec l’aide des SA (organisation paramilitaire du parti nazi). Sans succès. Son putsch manqué le conduit tout droit en prison, où il écrira Mein Kampf, mais lui permet aussi d’acquérir une certaine notoriété. Par ailleurs, cet événement est clé dans l’histoire du national-socialisme, dans la mesure où il permet à Hitler de prendre conscience qu’il ne parviendra à instaurer le nazisme en Allemagne que par voie légale.

En décembre 1924, Hitler sort de prison et retrouve un parti nazi très affaibli qui, jusqu’en 1929, n’obtiendra qu’un très faible pourcentage des suffrages lors des élections. Mais, au cours de ces années, Hitler travaille d’arrache-pied au sein de son parti, qu’il structure et hiérarchise. C’est aussi à cette époque que, sentant le contrôle des SA lui échapper, il se crée sa propre garde personnelle : les SS.

En 1929 survient la crise économique mondiale. L’Allemagne est touchée de plein fouet, et la population allemande insatisfaite se tourne plus volontiers vers les extrêmes. Le parti nazi compte de plus en plus d’adeptes.

En 1932, le chômage atteint 25 % de la population active allemande, et l’État ne peut même plus indemniser les chômeurs. Le mécontentement grandit, et le peuple se cherche un sauveur. Pour Hitler, qui promet monts et merveilles aux Allemands (du moins aux Allemands de race aryenne), c’est une chance inespérée d’accéder légalement au pouvoir. En juillet 1932, il obtient la majorité des voix au Parlement et, en janvier 1933, il est nommé chancelier, ce qui lui permet d’instaurer légalement le nazisme en Allemagne.

Voilà, dans les grandes lignes, les circonstances qui ont permis à un parti ouvertement raciste d’accéder au pouvoir. Mais il reste encore à comprendre comment les nazis sont parvenus à asseoir leur autorité. Nos guides nous ont alors fait découvrir une seconde tranche de l’histoire, celle qui s’étale de 1933 à 1939, juste avant le début de la Seconde Guerre mondiale.

La seconde partie de l’exposition retrace donc la destruction de la démocratie et l’instauration d’une dictature de la terreur.

Devenu chancelier, Hitler s’emploie à anéantir toute forme d’opposition. Et les choses vont vite. En février 1933, alors qu’il est chancelier depuis un mois à peine, Hitler interdit les partis socialistes, communistes et démocrates. La raison, ou plutôt le prétexte ? L’incendie du Reichstag, le siège du Parlement allemand à Berlin, dans la nuit du 27 au 28 février 1933. Les nazis attribuent cet acte criminel à un complot communiste et s’ensuit une campagne de répression contre les opposants de gauche. Encore aujourd’hui, le mystère demeure quant aux motivations des criminels. S’agissait-il d’un acte criminel qui fut exploité par les nazis à des fins politiques ? Certains vont même jusqu’à soutenir que ce fut une opération commanditée par les nazis pour justifier un durcissement du régime…

Le 22 mars 1933, le régime nazi amène les premiers prisonniers, des opposants politiques, au camp de concentration nouvellement créé à Dachau.

En juillet, le parti nazi est désormais le seul légal. Le 30 juin 1934, c’est la Nuit des longs couteaux, pendant laquelle Hitler se débarrasse des SA avec l’aide de sa garde personnelle, les SS. En effet, depuis son accession au pouvoir, Hitler doit faire face à des tensions qui opposent la SA aux partis conservateurs et à l’armée de la République de Weimar. Or, Hitler a pour ambition de succéder au président Hindenburg, et il a pour cela besoin du soutien des partis conservateurs et de l’armée…

Et, justement, en août 1934, Hindenburg meurt, laissant le champ libre à Hitler pour cumuler les fonctions de chancelier et de président. Le nazisme est dès lors pleinement ancré en Allemagne.

Au fil des années, l’idéologie nazie s’étend à tous les domaines de la vie, y compris l’art et la culture. La diversité culturelle du modernisme, considérée comme « dégénérée », est interdite. L’exclusion de ceux qui ne correspondent pas à l’idéologie raciale nazie, et en particulier les Juifs, se transforme en persécution. Certains citoyens allemands décident de se joindre à l’action. Les autres détournent simplement le regard. Il existait pourtant bel et bien une opposition au régime nazi (dans l’Église par exemple), mais très peu de gens osaient traduire leurs pensées en actes, tant il était avéré que les nazis punissaient sévèrement leurs opposants.

Le 10 novembre 1938 se dessinent déjà les prémices de la Shoah : c’est la Nuit de cristal, un pogrom contre les Juifs ordonné par Hitler et perpétré par ses sbires, mais officiellement présenté par les dirigeants nazis comme une réaction spontanée de la population à la suite de l’attentat commis par un jeune Juif contre un secrétaire de l’ambassade allemande à Paris. Au cours de cette Nuit de cristal, des centaines de lieux de culte juifs sont détruits, des milliers de commerces et entreprises tenus par des Juifs sont saccagés, des centaines de Juifs sont assassinés ou meurent de leurs blessures, et des dizaines de milliers sont par la suite déportés en camp de concentration. Une manière, pour les nazis, de donner un coup d’accélérateur à l’émigration juive, qu’ils jugent trop lente.

En Allemagne, la violence ne cesse donc de s’intensifier, et les Juifs ne sont pas les seules victimes : les Sinti, les Roms, mais aussi les personnes handicapées et les malades mentaux, font les frais de ce que l’on qualifie aujourd’hui de véritable programme d’euthanasie.

Parallèlement à ces événements, Hitler a enclenché le réarmement de l’Allemagne dès son accession au pouvoir, dénonçant officiellement le traité de Versailles et se préparant ouvertement à la guerre. La France et le Royaume-Uni, pourtant, ne réagissent pas, espérant peut-être éviter un nouveau conflit armé en se montrant conciliants. Par ailleurs, l’armée allemande ne leur semble pas en mesure d’inquiéter les leurs, ce qui favorise une certaine inaction.

En novembre 1937, Hitler fait part de ses ambitions expansionnistes à son état-major. Selon lui, il est impératif de conquérir rapidement de nouveaux territoires afin d’éviter une famine en Allemagne, où les réserves manquent. Et le 12 mars 1938, la conquête est lancée avec l’Anschluss, l’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie.

S’ensuit l’annexion des Sudètes, une région de Tchécoslovaquie majoritairement peuplée d’Allemands. Dans un premier temps, la France et le Royaume-Uni mobilisent leurs troupes pour soutenir la Tchécoslovaquie. Mais finalement, le 30 septembre 1938, dans l’espoir vain d’éviter une nouvelle guerre, la France et le Royaume-Uni signent les accords de Munich, entérinant l’annexion des Sudètes. Un événement qui marque définitivement la capitulation des démocraties face aux agressions d’Hitler.

Le 15 mars, Hitler annexe le reste de la Tchécoslovaquie, en dépit de ce qui avait été convenu lors des accords de Munich.

Le 23 août 1939, Hitler – qui s’était déjà allié à l’Italie de Mussolini en 1936 (formation de l’Axe Rome-Berlin) – signe le pacte germano-soviétique avec Staline. Cette alliance, qui laisse sous le choc les démocraties, peut sembler contre-nature tant leurs idéologies s’opposent. Et pourtant, chacun cherche à servir ses intérêts personnels et, dans cette optique, l’alliance fait sens. D’un côté, Staline ne se sent pas prêt à affronter l’Allemagne, qui se prépare manifestement à la guerre. Dans un même temps, il est conscient que le fossé ne cesse de se creuser entre la dictature communiste et les démocraties. Or, ces dernières commencent à montrer leurs faiblesses, et une alliance avec le dictateur nazi lui semble plus judicieuse. De son côté, Hitler sait que son armée n’est pas (encore) en mesure de se battre sur deux fronts, et il doit s’assurer la paix, du moins temporairement, du côté est.

Nos guides nous ont ensuite fait découvrir la troisième partie de l’exposition, celle qui nous entraîne en plein cœur de la Seconde Guerre mondiale, depuis le déclenchement de la guerre jusqu’à l’effondrement du régime nazi. Conscientes de nos connaissances plus approfondies sur cette partie de l’Histoire, mais aussi faute de temps, nos guides ont choisi de nous faire parcourir cette section plus rapidement. Nous nous contenterons donc nous aussi d’une plus brève description.

Ici, l’exposition présente d’une part les crimes perpétrés par les soldats et policiers munichois, et d’autre part la vie quotidienne dans la ville en temps de guerre, et en particulier pour les personnes persécutées. À Munich, il est impossible pour la population de ne pas remarquer les personnes déportées, qui arrivent en masse des territoires occupés pour effectuer des travaux forcés, notamment dans l’industrie de l’armement.

Et pourtant, les actes de résistance ne sont pas communs, car le régime nazi intensifie sa politique de persécution à mesure que la guerre avance, et tous ceux qui s’opposent à lui s’exposent à des conséquences dramatiques. Ceci fut particulièrement vrai dans la phase finale de la guerre, durant laquelle le régime nazi poussa la violence à son paroxysme. Ainsi, de nombreux résistants payèrent leur courage de leur vie. Ce fut notamment le cas des membres du groupe de résistants allemands La Rose blanche, qui furent condamnés à mort et exécutés.

Le 30 avril 1945, l’armée américaine entre dans Munich, marquant la fin du régime nazi.

Enfin, il est très intéressant de constater que le Centre de documentation sur l’histoire du national-socialisme a dédié une section importante de son exposition à la période de l’après-guerre, alors même que le régime nazi s’était écroulé.

Au-delà de la dénazification et de la reconstruction de l’Allemagne après sa défaite, la dernière partie de l’exposition aborde la manière dont le pays s’est confronté aux crimes qu’il avait perpétrés. À l’aide d’exemples, le Centre nous montre à quel point cette confrontation, lente, hésitante et souvent maladroite, fut compliquée pour Munich et ses habitants.

Si, d’un côté, Munich est parvenue à se redémocratiser à l’issue de la guerre, il faut noter que nombreux furent ceux qui nièrent toute responsabilité personnelle, voire qui se refusèrent à éprouver un quelconque sentiment de culpabilité. Lorsqu’ils étaient jugés, les coupables n’étaient condamnés qu’à une peine légère, du moins dans la plupart des cas.

Pendant longtemps après la guerre, les attitudes des Allemands à l’égard de leur passé nazi ont oscillé entre honte, remise en question, mais aussi déni, voire continuité. Et bien que l’extrémisme de droite et l’antisémitisme soient sévèrement condamnés par l’opinion publique depuis 1945, l’intolérance et les discriminations persistent au sein de la société, donnant parfois lieu à des actes de terrorisme (attentat lors de l’Oktoberfest de Munich en 1980, meurtres commis par le groupe néonazi Nationalsozialistischer Untergrund au début des années 2000…).

Ces attitudes fluctuantes s’illustrent également dans l’architecture munichoise et dans la manière dont furent traités les symboles du national-socialisme depuis la fin de la guerre. Il y eut beaucoup de débats concernant les volontés de destruction ou de conservation des édifices nazis, les opinions voulant d’une part les transformer en lieux dédiés au souvenir et à la mémoire des victimes, et souhaitant d’autre part faire table rase du passé et éviter les rassemblements néonazis sur ces lieux.

Dans un premier temps, la tendance fut plutôt à l’abandon ou à la destruction des bâtiments nazis, témoignant d’une volonté d’oublier ou de nier le passé. Ce n’est que dans les années 1980 que les citoyens de Munich ont commencé à militer en faveur d’une culture du souvenir. Ouvert en 2015, le Centre de documentation sur l’histoire du national-socialisme en est l’un des aboutissements.

Enfin, avant de nous quitter, notre guide nous a alertés quant au retour des extrêmes sur le devant de la scène politique allemande. Le parti Alternative pour l’Allemagne (AFD) rencontre un succès croissant, l’extrême droite atteignant l’un de ses plus hauts niveaux de popularité depuis l’après-guerre. Dans un contexte d’inflation, de récession et d’inquiétude liée à la guerre en Ukraine, la coalition actuellement au pouvoir est bien loin de faire l’unanimité auprès de la population allemande, ce qui profite directement à l’AFD.

Une situation que l’on retrouve dans de nombreux pays d’Europe, et qui doit évidemment nous inciter à redoubler de vigilance.

Alicia GENIN

C’est en souvenir du groupe résistant La Rose blanche que le maire de Dachau donne chaque année une rose blanche aux jeunes au début de la cérémonie au crématorium de l’ancien camp de concentration de Dachau.

Pèlerinage 2023 à Dachau

Vendredi 28 avril

Notre pèlerinage à Dachau a débuté le vendredi 28 avril en fin d’après-midi, avec une commémoration et un dépôt de gerbe au cimetière d’honneur du camp de concentration de Dachau, au Leitenberg.

Entre février et avril 1945, la colline du Leitenberg, située non loin du camp de Dachau, avait été le théâtre d’un sinistre spectacle : celui de détenus de Dachau contraints par les SS à creuser huit fosses communes pour y ensevelir les cadavres de plus de 4 000 de leurs camarades. En effet, vers le mois de février 1945, en raison de la pénurie de charbon, les fours crématoires du camp avaient cessé de fonctionner, forçant les nazis à trouver une alternative pour se débarrasser des corps de leurs victimes.

Après la libération, les Américains avaient ordonné la construction de deux autres fosses communes pour y enterrer deux milliers de morts supplémentaires… Le lugubre travail étant cette fois confié à des nazis et des paysans de Dachau. Ce n’est qu’en 1949 que le site fut réaménagé afin de fournir un lieu de sépulture digne des victimes, donnant naissance au cimetière d’honneur que nous connaissons aujourd’hui.

Au fil des ans, les services de recherche procédèrent à des exhumations et rapatrièrent les morts identifiés, les autres restant au Leitenberg, mais cette fois inhumés dans des tombes individuelles. Aujourd’hui, plus de 7 400 victimes du régime nazi sont enterrées sur la colline du Leitenberg.

Le Leitenberg est donc un lieu du souvenir important pour les descendants de déportés. Tous les ans, le Comité International de Dachau y tient une cérémonie, durant laquelle ses membres fleurissent la grande croix chrétienne érigée au sommet de la colline. L’Amicale française était présente au rendez-vous pour honorer la mémoire des déportés qui y furent enterrés.

Cette année, Dominique Boueilh, nouveau président du CID, avait choisi d’y faire lire le « serment de Dachau », prononcé pour la première fois par les anciens de Dachau à cet endroit même, le 29 mai 1955, à l’occasion du 10e anniversaire de la libération du camp :

« Dix ans après la libération, réunis à Dachau, au lieu même où des centaines de milliers de concentrationnaires de tous pays connurent la souffrance et mêlèrent leur sang, unissant dans notre pensée leur martyr à celui de tous ceux qui tombèrent en défendant leur patrie contre l’oppression,

Nous jurons de garder vivant le souvenir des victimes de la barbarie nazie

Nous jurons de lutter pour empêcher le retour des camps de la mort et l’emploi de tout autre moyen d’extermination massive,

Nous jurons de nous opposer à ce que les bourreaux, leurs chefs et leurs maîtres retrouvent des armes pour attaquer et asservir les peuples,

Nous jurons, pour rester fidèles à l’union et à la camaraderie nées dans la souffrance et dans le combat, de nous consacrer au rapprochement des peuples dans la paix en vue d’assurer leur sécurité, leur indépendance et leur liberté. »

Après le Leitenberg, nous nous sommes rendus au cimetière de Waldfriedhof, situé à quelques minutes à peine.

Dans ce cimetière se trouve un carré funéraire aménagé pour 1 312 victimes du camp de concentration de Dachau, décédées des suites de leur déportation au cours des mois qui suivirent leur libération par les Américains. À la fin des années 50, les corps de certains déportés furent rapatriés dans leur pays d’origine, et les tombes laissées vacantes furent utilisées comme lieux de sépulture pour des victimes des « marches de la mort », initialement enterrées dans des cimetières qui jalonnaient leur trajet.

Le cimetière de Waldfriedhof fait lui aussi l’objet d’une cérémonie annuelle avec dépôt de gerbe, qui clôturait cette année la première journée de notre pèlerinage.

Samedi 29 avril

Le samedi 29 avril au matin, notre groupe a quitté Dachau pour se rendre à Munich. Nous étions attendus au Centre de documentation sur l’histoire du national-socialisme, pour une visite guidée de presque deux heures. En raison de sa teneur historique, nous avons décidé de consacrer un article dédié au compte rendu de cette visite. Rendez-vous ici pour des explications sur la création et l’accession au pouvoir du régime nazi, ainsi que sur ses suites et sur les orientations futures de la société.

Notre parcours terminé en début d’après-midi, nous sommes retournés à Dachau pour une seconde visite guidée, cette fois à l’ancien camp de concentration. Pendant presque trois heures, notre guide nous a fait explorer l’ensemble du site, le crématorium, les baraques, et s’est longuement attardée au sein de l’ancien bâtiment d’intendance, qui abrite l’exposition principale du Mémorial de Dachau. Inaugurée en 2003, cette exposition a pour objectif de retracer le « chemin » des déportés, dont le destin tragique est reconstitué depuis leur incarcération jusqu’à leur libération, en passant par les souffrances endurées quotidiennement dans le camp, où la mort était omniprésente.

Rappelons qu’au cours des prochaines années, le Mémorial de Dachau fera l’objet d’une refonte complète et que son musée bénéficiera d’une toute nouvelle exposition. En effet, l’exposition actuelle a désormais 20 ans et, en matière de contenu, de concept, de didactique et de design, est donc quelque peu « datée ». Elle sera prochainement restructurée en prenant en compte les informations historiques récentes, les nouvelles technologies, l’adaptation aux malvoyants et malentendants ainsi que l’accès aux personnes à mobilité réduite. Une nouvelle exposition est également en préparation pour les baraques, qui actuellement reconstituent l’espace tel qu’il se présentait en 1933-1934, en 1937-1938 et en 1944-1945. Par ailleurs, une extension de la superficie totale du site commémoratif, avec l’inclusion de certains bâtiments d’importance historique, est prévue afin d’accueillir au mieux le nombre croissant de visiteurs (approximativement 900 000 par an).

Notre visite au camp de Dachau s’est terminée aux alentours de 17 heures, alors que les membres du Comité International de Dachau procédaient à un dépôt de gerbe au pied du monument de la flamme, situé sur l’ancienne place d’appel du camp.

Sandra Quentin porte le drapeau du CID. Jean Lafaurie et Dominique Boueilh déposent la gerbe.

Enfin, nous avons quitté tous ensemble l’enceinte du camp pour nous diriger vers le monument commémoratif des marches de la mort. C’est là qu’eut lieu la dernière cérémonie de cette journée, afin de rendre un hommage particulier aux milliers de prisonniers de Dachau et de ses camps annexes qui, plusieurs jours avant la libération du camp, furent évacués par les SS et contraints d’entreprendre des marches forcées. Au cours de ces marches de la mort, nombreux furent ceux qui perdirent la vie, terrassés par la maladie, la faim ou par les coups de leurs bourreaux, qui punissaient sévèrement quiconque, à bout de forces, avait le malheur de s’arrêter ou de ralentir la cadence.

Dimanche 30 avril

Cérémonies de commémoration du 78e anniversaire de la libération du camp de concentration de Dachau

Dimanche 30 avril 2023, une multitude de visiteurs – dont 15 survivants de Dachau, deux libérateurs américains et de très nombreux descendants de déportés – avaient répondu à l’invitation de Dominique Boueilh, président du CID, Gabriele Hammermann, directrice du Mémorial de Dachau, et Karl Freller, directeur de la Fondation des mémoriaux bavarois, les conviant à la commémoration du 78e anniversaire de la libération du camp de concentration de Dachau. De nombreuses personnalités publiques – ambassadeurs, politiques, représentants de différentes confessions religieuses – étaient également présentes pour rendre hommage aux victimes du camp de Dachau et à leurs libérateurs.

La journée a débuté par différents services religieux, puis s’est poursuivie par une cérémonie à l’ancien crématorium du camp, ponctuée par des discours émouvants, notamment celui d’Abba Naor, survivant de la Shoah et vice-président du CID. Après un premier dépôt de gerbe, l’assemblée s’est dirigée en cortège jusqu’à l’ancienne place d’appel du camp, avec en tête le général Jean-Michel Thomas, qui portait le Livre des morts de Dachau, et les porte-drapeaux des pays d’origine des quelque 200 000 personnes déportées vers Dachau et ses camps satellites.

Abba Naor lors de son discours.

La cérémonie principale, sur l’ancienne place d’appel, a été marquée par les discours de Gabriele Hammermann, Karl Freller, Michael Piazolo (ministre de l’Éducation) et Dominique Boueilh, mais aussi par les messages commémoratifs émouvants de plusieurs survivants et libérateurs. Karl Freller a souligné, à l’aide de l’exemple historique de la République de Weimar et de l’histoire des premiers camps sous la dictature nazie, la nécessité de défendre la démocratie en restant vigilant et en se défendant.

À l’issue de la cérémonie, ce sont pas moins de 98 couronnes de fleurs qui ont solennellement été déposées, parmi lesquelles des couronnes de représentants de groupes de victimes, de la politique locale, régionale et fédérale, et notamment du président fédéral et du chancelier fédéral.

Enfin, nous nous sommes rendus au centre Max Mannheimer, qui convie chaque année les membres de notre Amicale à un généreux repas. L’occasion pour nous de clore notre pèlerinage dans la convivialité.

Vous trouverez ci-dessous le discours prononcé par Dominique Boueilh ci-dessous sur l’ancienne place d’appel et, pour finaliser cet article dédié à notre pèlerinage 2023 à Dachau, nous vous proposons un message de Serena Adler, de l’Amicale roumaine de Dachau, nous expliquant pourquoi il est essentiel pour elle de revenir chaque année sur le site commémoratif du camp.

Alicia GENIN

Allocution du président du CID – Mémorial de Dachau, 30 avril 2023

« C’est avec un immense honneur que je m’adresse à vous toutes et tous, en qualité de nouveau président du CID. Depuis de nombreuses années, je participe à la vie du Comité International de Dachau, et aux commémorations annuelles de la libération du camp. Pourautant, je ne vous cache pas être envahi en ce moment précis d’une grande émotion.

Permettez-moi d’avoir une pensée intime pour mon père, Didier Boueilh. Âgé de 18 ans, l’âge précis de son arrière-petit-fils Enzo ici présent, il est arrivé au camp de Dachau le 5 juillet 1944, à bord du sinistre convoi 7909, dit « Train de la Mort », et auquel il survivra par miracle. Il sera libéré, à l’aube du 29 avril 1945 par les soldats américains, à qui il vouera toute sa vie une reconnaissance sans limite.

Pour la fin des souffrances de milliers de détenus, pour cette liberté retrouvée, nous devons tous nous honorer aujourd’hui de la présence parmi nous de libérateurs, arrachés à leur jeunesse pour libérer de l’envahisseur nazi une Europe qui leur était lointaine.

Je souhaite également rendre un vif hommage à mon prédécesseur, le général Jean-Michel Thomas, et à toute son équipe, pour les actions menées durant ses deux mandatures, et pour les liens étroits développés avec la Fondation des mémoriaux bavarois et avec le Mémorial du camp de Dachau. Ces liens ont permis en particulier de traverser la crise sanitaire avec résilience et solidarité. Je tiens ici, au nom du CID, à en remercier très sincèrement le Ministère bavarois de l‘Éducation et de la Culture, la Fondation des mémoriaux bavarois et le Mémorial du camp de Dachau.

C’est avec joie que nous retrouvons aujourd’hui le caractère public, chaleureux et fraternel de nos commémorations. Le temps des projets et de notre engagement est revenu, plus fort encore, et motivé par le contexte d’une actualité européenne préoccupante et par la persistance d’atteintes à nos valeurs fondamentales.

Notre première volonté sera de soutenir et d’accompagner le nouveau projet de rénovation du Mémorial. C’est un projet innovant, ambitieux et nécessaire pour susciter l’écoute des nouvelles générations. Nous sommes confiants dans la capacité des différents acteurs à se réunir pour surmonter les difficultés actuelles et inhérentes à un projet d’une telle envergure. La vision d’un champ de Mémoire rénové, mais toujours fidèle à sa mission première, pourra alors être menée à son terme. Il sera bâti sur l’héritage du Mémorial de Dachau érigé en 1965, lequel est resté très précieux au Comité International de Dachau.

Enfin notre champ d’action ne saurait s’arrêter aux murs de cette enceinte. La Mémoire de la Déportation doit continuer à s’exercer dans tous les pays de notre Europe, pour éveiller la conscience et susciter la responsabilité de chaque citoyen, pour faire face à la montée des extrêmes et pour protéger nos modèles de démocratie. Il nous appartient de raviver et accompagner cette Mémoire partout où elle s’affaiblit, par l’intermédiaire de nos représentations nationales et des instances dédiées de chaque pays, mais aussi avec la collaboration des autres comités internationaux. Le Comité International de Dachau restera très attaché à cet objectif.

La Mémoire des camps est fédératrice et point d’attache des descendants de déportés. Elle demeure le lien indéfectible entre le crime d’histoire passé, et les espoirs d’un monde apaisé et libre de toute atteinte à la dignité humaine.

Les sacrifices de nos héros d’hier et les efforts considérables mis dans ce mémorial ne doivent pas rester vains.

Vous seul, cher public, pouvez faire de nos espoirs, de vos espoirs, la réalité de demain, après votre visite en ces lieux.

Je vous remercie pour votre attention.»

Message de Serena Adler, Amicale roumaine (AERVH)

« Cette année, je suis revenue à Dachau pour les cérémonies commémoratives et pour la rencontre annuelle du Comité International de Dachau. Depuis 2002, je reviens toujours avec la même émotion à cette rencontre avec l’histoire de nos familles, projetée sur l’histoire de la Seconde Guerre mondiale.

Nous, les membres du CID, sommes spirituellement liés par les histoires similaires que nos parents ont vécues pendant cette période.

Je pense que nous réunir une fois par an est une bonne occasion de partager notre expérience personnelle sur la façon dont chacun d’entre nous garde et honore la mémoire des anciens. Nous faisons cela pour donner plus de sens au « plus jamais », que tout le monde connaît.

Chacun de nous a sa propre histoire de famille et le souvenir de ce qui s’est passé, ce qui nous ramène à Dachau.

Mon grand-père et mon père ont été libérés à Dachau, et malheureusement ils sont revenus à la maison sans ma grand-mère, qui n’a pas eu la chance d’échapper au triage de Mengele, fait à Birkenau, au début de leur déportation. Histoire d’une famille, histoire des familles.

L’histoire nous suit. Nous revivons cette histoire aujourd’hui, comme une répétition troublante dans notre région, dans le monde.

En mémoire des membres de ma famille, mais aussi des millions tués en ce temps-là, je considère comme un devoir moral d’honneur de faire tout ce que je fais volontairement pour continuer à faire vivre leur mémoire.

Par l’intermédiaire de mes éditions, que je réalise depuis plusieurs années, je continue à parler de ce sujet avec le soutien de mes amis, des survivants que je rencontre, des historiens, des journalistes, des enseignants et des étudiants. Même si c’est difficile, et pour que l’histoire ne se répète pas, pour le salut de nos âmes, je tiens au devoir de mémoire.

La législation, la politique de mon pays prévoit des cours dédiés à la mémoire.

Les jeunes écoutent et posent des questions qui montrent à quel point il est difficile pour eux de comprendre les actes que des hommes ont commis à l’encontre d’autres êtres humains.

Par conséquent, nous, les générations suivantes, avons l’obligation de continuer à raconter nos histoires de famille. Il en est de notre devoir moral.

Pour moi, le respect est important. C’est pour cette raison que nous sommes présents chaque année à Dachau : pour notre propre respect et pour celui de nos familles.

Quand je dis « nos familles », je pense aussi aux personnalités du CID qui ne sont plus avec nous, mais qui restent présentes, veillent sur nous, pour voir ce que nous faisons et comment nous poursuivons leurs efforts… Mais je pense aussi à nos jeunes familles, à qui nous voulons montrer pourquoi elles devraient nous rejoindre et continuer à transmettre la mémoire de la vraie histoire de la Seconde Guerre mondiale.

C’est notre devoir de continuer, pour que jamais de tels actes ne se reproduisent dans le monde.

Nous avons envie de mieux nous connaître, d’être comme une famille avec ceux qui ont souffert dans les mêmes conditions pendant la guerre. Chacun d’entre nous mérite un respect égal à celui de n’importe quel autre d’entre nous !

Nous devons nous concentrer sur l’avenir. Faisons-le, en tenant compte du présent.

Nous sommes capables d’agir ensemble dans ce devoir moral. »

Rencontre bisannuelle de l’Union des associations de mémoire des camps nazis (UAMCN) et Assemblée Générale 2023 de l’Amicale de Dachau

L’Union des associations de mémoire des camps nazis vous invite à sa rencontre bisannuelle le samedi 25 novembre 2023 à la mairie du 20e arrondissement de Paris.

Programme :

  • 9 h – Rendez-vous au cimetière du Père-Lachaise, à l’entrée de la rue des Rondeaux. Des hommages et dépôts de gerbes auront lieu aux six monuments de nos associations.
  • 10 h 15 – Dépôt de gerbe au monument aux morts de la mairie du 20e
  • 10 h 30 – Débat : l’UAMCN face à elle-même, à l’écoute de ses adhérents.
    L’échange portera sur les préoccupations qui nous agitent et nous rassemblent, dans la perspective du 80e anniversaire de la libération des camps. La parole des participants sera sollicitée. (en préparation)
  • 12 h 30 – Déjeuner sur place (buffet) avec participation de 35 €
  • 14 h 30 – Réunions statutaires de chacune de nos associations. L’Amicale de Dachau tiendra à cette occasion son Assemblée Générale 2023.

Nous vous attendons nombreux pour ce rassemblement qui fait suite à l’officialisation de l’Union des amicales, et pour notre Assemblée Générale 2023.

Merci de bien vouloir vous inscrire auprès du secrétariat de l’Amicale de Dachau avant le 5 novembre 2023.

3 mai 1945 – La tragédie de la baie de Lübeck

L’Union des associations de mémoire des camps nazis (UAMCN) et l’Institut historique allemand (IHA) vous invitent à une table ronde sur :

3 mai 1945 – La tragédie de la baie de Lübeck

Avec la participation de trois historiens :

  • Christine Eckel, membre de la Fondation des mémoriaux et lieux didactiques de Hambourg, en charge du site du Stadthaus
  • Dr Lars Hellwinkel, enseignant, responsable pédagogique du Mémorial du camp de Sandbostel
  • Dr Christel Trouvé, directrice scientifique au Denkort Bunker Valentin, Bremen-Farge

Modérateur : Dr Jürgen Finger, directeur du département Histoire contemporaine de l’Institut historique allemand

le vendredi 22 septembre 2023 (de 14 à 17 h)

à l’Institut historique allemand (8, rue du Parc royal, 75003 Paris)

  • Inscription par mail avant le 8 septembre : interamicale1945@gmail.com. Nombre limité de places.
  • Possibilité d’assister à cette rencontre en visioconférence. Informations et inscription par mail : interamicale1945@gmail.com
  • Pour préparer cette rencontre, projection en ligne quelques jours avant (date à définir) du film documentaire d’Isabelle Saunois « Ma mémoire d’Adrien », sorti en France en 2010. Informations et inscription par mail : interamicale1945@gmail.com

3 mai 1945. En pleine baie de Lübeck sur la mer Baltique, plus de 7 000 déportés de diverses nationalités disparaissent en quelques heures. C’est l’une des plus grandes catastrophes maritimes de l’histoire. Quelques jours plus tard, la guerre était finie…

Fin avril 1945, pour répondre à un ordre du Reichsführer-SS Heinrich Himmler, le gouverneur de Hambourg, Karl Kaufmann, et le commandant du camp de concentration de Neuengamme, Max Pauly, décident de réquisitionner quelques bateaux stationnant en baie de Lübeck et d’y entasser plusieurs milliers de détenus, transformant ainsi ces bateaux en KZ flottants.

L’après-midi du 3 mai, deux de ces bateaux, le cargo Thielbek et le paquebot Cap Arcona, sont la cible de bombardements par des avions britanniques. Le Thielbek sombre en 20 minutes, le Cap Arcona flambe de la poupe à la proue et se couche sur le flanc. Sur les plus de 4 500 déportés à bord du Cap Arcona, environ 350 survivront, sur les 2 800 déportés du Thielbek, 50 survivront.

Comment et pourquoi tant de victimes en si peu de temps ? Comment et pourquoi cela fut-il possible alors que la paix était si proche ?

C’est ce que nos amis historiens vont analyser, expliquer et nous aider à comprendre.

Cérémonies d’Eysses – 25 et 26 février 2023

C’est tous les ans le même rituel, mais un rituel indispensable à l’entretien de la mémoire de l’insurrection d’Eysses de février 1944.

Une histoire rappelée par Jean Lafaurie, président de l’Association des Anciens d’Eysses et solide ancien déporté de 99 ans. Monsieur Lafaurie a rendu un hommage appuyé à nombre de ses camarades fusillés, abattus ou décédés faute de soins. Et de terminer son discours par ces mots, soulignant ce que la « République d’Eysses » avait apporté aux déportés :

« La volonté de continuer nos combats, le premier était de ne pas perdre notre dignité d’hommes, ensuite de saboter tout ce que nous pouvions. C’est cet esprit de solidarité que nous avons créé à Eysses qui nous a permis de les gagner. »

Monsieur le maire de Villeneuve-sur-lot, Guillaume Lepers, a rappelé que :

« Ces 1200 hommes incarnaient la résistance dans ce qu’elle avait de plus grand. Ils étaient issus de toutes les catégories sociales et de tous les milieux professionnels, mais ils avaient le même idéal : ensemble continuer la lutte. Souvenons-nous de ces hommes qui ont lutté par conviction, pour défendre nos valeurs d’égalité, de fraternité et de liberté. Nous devons aux résistants d’Eysses de perpétuer leur souvenir, le souvenir de leur épopée, le souvenir de leur incroyable courage : nos enfants doivent entendre cette histoire, car elle est leur HISTOIRE. »

En fin de cérémonie, Olivier Rivière, fils du résistant déporté Marcel-Gabriel Rivière, ancien de Dachau, a reçu avec beaucoup d’émotion le diplôme et la médaille de la Résistance, attribués à son père à titre posthume.

Michèle JUBEAU-DENIS
Présidente de l’Amicale de Dachau Nouvelle-Aquitaine

Olivier Rivière recevant, pour son père à titre posthume, le
diplôme et la médaille de la Résistance.

Cérémonie du Père Lachaise 2022

Traditionnellement, pour les fêtes de la Toussaint, la FNDIRP rend hommage aux victimes de la barbarie nazie en déposant des fleurs au crématorium, au jardin du Souvenir, au pied des Monuments de chacun des camps de concentration, devant la tombe de Christian Pineau et devant le caveau de la FNDIRP, au cimetière du Père Lachaise.

L’Amicale de Dachau sera présente lors de cette cérémonie et vous invite à l’y rejoindre le :

Jeudi 27 octobre 2022 à 10 heures au Cimetière du Père Lachaise

Rendez-vous à 9 h 45 devant l’entrée, rue des Rondeaux (métro Gambetta)

Cérémonie à la gare de Penne-d’Agenais (Lot-et-Garonne) – 28 mai 2022

Il y a 78 ans, le 30 mai 1944, 1200 résistants de toutes sensibilités, livrés aux nazis par Vichy, partaient de la gare de Penne-d’Agenais en wagons plombés.

La commémoration a eu lieu en présence de monsieur le Sous-Préfet, de Jean Lafaurie, ancien d’Eysses, de monsieur le Maire, Arnaud Devilliers, de porte-drapeaux, de maires et élus des communes voisines, de représentants des Amicales d’Eysses et de Dachau, d’associations mémorielles et de membres du public.

Monsieur Lafaurie, trop ému pour parler au souvenir de ce sinistre voyage, a laissé monsieur Guy Victor, président de l’ANACR, rappeler qu’il y a 78 ans ces hommes prenaient la direction de Compiègne, où ils n’arriveraient que le 3 juin, à l’aube, pour en repartir le 18 juin à destination de Dachau.

Livrés à la division Das Reich, de sinistre mémoire, ces 1200 résistants avaient parcouru les 8 kilomètres d’Eysses à la gare de Penne. Une centaine d’entre eux avaient effectué le trajet à pied, à une cadence infernale, sous les hurlements et coups des SS ; les autres avaient été chargés dans des camions.

Le premier mort de cette déportation fut un républicain espagnol, Angel Huerga. Les 1200 noms gravés dans la stèle sont ceux de résistants dont la seule volonté était de retrouver une France libre.

Michèle JUBEAU-DENIS

Commémoration du départ du Train de la Mort (78e anniversaire)

Mémorial des Martyrs de la Déportation, 2 juillet 2022

Le 2 juillet 1944, le convoi n°7909 partait de la gare de Compiègne à destination du camp de concentration de Dachau, transportant à son bord plus de 2000 détenus. Entassés par groupes de 100 dans des wagons à bestiaux ne pouvant en principe accueillir plus de 40 hommes, les prisonniers allaient voyager debout pendant trois jours, chacun disposant d’un espace vital aux dimensions comparables à celles d’une feuille de papier A4. À ces conditions inhumaines s’en ajouteraient d’autres au cours du trajet : le manque de ravitaillement, mais aussi une chaleur suffocante, car les déportés eurent la terrible malchance de voyager par temps caniculaire. Le 5 juillet, à l’arrivée en gare de Dachau, des corps innombrables et sans vie furent extraits des wagons. Selon certaines estimations, 984 cadavres prirent la direction du four crématoire du camp de Dachau, qu’ils alimentèrent quatre jours durant.

Pour des raisons évidentes, ce convoi n°7909, dit « Train de la Mort », tient une place importante dans le cœur des déportés de Dachau et leurs familles. Notre Amicale en rend compte le 2 juillet de chaque année à la crypte du Mémorial des Martyrs de la Déportation (Paris), où elle se réunit pour un moment de recueillement. Cette année, nous avons tenu à en faire un événement de plus grande ampleur, car nous avons de nouveau fait l’impasse sur l’organisation d’un congrès, 2022 restant marquée par de trop nombreuses incertitudes liées à la crise sanitaire. Ce samedi 2 juillet, vous étiez donc également invités à participer à un cocktail déjeunatoire ainsi qu’à notre Assemblée Générale, qui se sont tenus à la suite de la cérémonie dans une salle conviviale située à proximité.

Reflet de la reprise de notre vie associative, nous étions une quarantaine – soit près du double de l’année précédente – à nous rassembler à la crypte, où nous avons été accueillis par Dominique Boueilh, président de notre Amicale. Au cours de son allocution de bienvenue, notre président s’est également félicité d’un autre fait exceptionnel : quatre générations composaient notre assemblée ce jour-là, près d’un siècle séparant la plus jeune membre présente de notre représentant le plus âgé ! Preuve d’un véritable attachement transgénérationnel à la mémoire de la Déportation… Dominique Boueilh a également souligné notre incroyable privilège de compter parmi nous trois anciens de Dachau, dont deux témoins directs de la tragédie du Train de la Mort.

Jean Samuel, Jean Lafaurie et André Gaillard se tiennent devant la tombe de la crypte, où sont inhumés les restes d’un déporté inconnu. Sur la gauche, Estelle Samuel, épouse de Jean, et Jean-Michel Thomas, président du Comité International de Dachau. Sur la droite, Pierre-Antoine Quentin, qui portait notre drapeau ce jour-là, et Dominique Boueilh, président de notre Amicale nationale.

André GAILLARD
André Gaillard est né le 10 octobre 1922 et fêtera donc ses 100 ans cette année. Déporté par le Train de la Mort parti de Compiègne le 2 juillet 1944, il est arrivé le 5 juillet 44 à Dachau, où il a reçu le matricule 76834. André Gaillard avait été arrêté dans un collège d’Avon, où le directeur cachait des enfants juifs et des gens qui, comme lui, refusaient de se soumettre au service de travail obligatoire en Allemagne. André Gaillard était surveillant dans ce collège. Après son arrivée à Dachau, André Gaillard fut transféré vers le centre de l’Allemagne, au camp du Neckargerach. Il y fut employé dans une mine de gypse, où les Allemands voulaient construire une usine à l’abri des bombardements. André Gaillard fut libéré et pris en charge par les Américains début avril 1945.

Jean LAFAURIE
Né le 30 novembre 1923, Jean Lafaurie fêtera ses 99 ans en fin d’année. Il a quant à lui été déporté par un autre convoi, arrivé à Dachau le 20 juin 1944. À Dachau, il a reçu le matricule 73618. Maçon et cimentier, Jean Lafaurie était entré dans la Résistance dès l’appel du général de Gaulle, à l’époque en réécrivant des tracts qu’il distribuait. En décembre 1940, il avait rejoint l’Organisation Spéciale, puis, en 1942, les Francs-tireurs et partisans français, dans le maquis Guy-Moquet situé en Corrèze. Arrêté le 14 juillet 1943, il fut emprisonné à la prison de Tulle puis de Limoges, où il passa devant une section spéciale qui le condamna à 5 ans de travaux forcés. Muté à la centrale d’Eysses en octobre 1943, il participa aux diverses manifestations résistantes et à la tentative d’évasion avortée du 19 février 1944. Le 30 mai 1944, il fut livré aux SS par le gouvernement de Pétain et transféré au camp de Compiègne. Le 18 juin 1944, il partit pour le camp de concentration de Dachau, dont il fut finalement libéré le 29 avril 1945 par les Américains.

Jean SAMUEL
Né le 15 décembre 1923, Jean Samuel quitte Paris à la suite de la débâcle, et part travailler comme aide-comptable à Agen. En 1942, il participe au ravitaillement du maquis situé sur le plateau des Causses près de Millau. En 1943, il entre au réseau Plutus du mouvement Combat. Service des approvisionnements en faux-papiers de la plupart des mouvements ou organisations de la Résistance, d’abord en zone sud, puis en zone nord. En mai 1944, il est arrêté dans le bureau des faux-papiers, Cité des Fleurs, dans le 17e arrondissement, à Paris. Torturé pendant deux jours par la Gestapo, rue des Saussaies à Paris, il résiste au supplice de la baignoire. Il est transféré le 18 mai à la prison de Fresnes. Il en repart le 27 juin, pour Compiègne, où il reste environ une semaine. Déporté à Dachau le 2 juillet 1944 par le Train de la Mort, il est ensuite envoyé à Neckargerach. En 1945, il subit la marche de la mort de Neckargerach à Dachau. Jean sera libéré, à Dachau, le 29 avril 1945 par les Américains.

Après avoir retracé dans les grandes lignes le parcours des déportés présents à la cérémonie, Dominique Boueilh a encouragé ceux-ci à prendre la parole, concluant son allocution par ces mots : « Plus que les longs discours, je vous invite à profiter du privilège de la présence d’André Gaillard, de Jean Samuel et de Jean Lafaurie pour écouter leur témoignage direct. Faisons de leur voix encore présente le dernier instrument pour lutter contre le retour des courants et des idéaux obscurs qui encombrent notre société et notre monde géopolitique, pour lutter contre les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité, et pour rappeler le sens du seul combat qui doit nous animer, celui de l’esprit de Dachau. »

Jean Samuel et André Gaillard, tous deux survivants du convoi du 2 juillet, ont ainsi évoqué leurs souvenirs. 78 ans après les faits, Jean Samuel s’est dit « étonné d’être là et de pouvoir [nous] en parler ». Il nous a rappelé que, en raison de l’épuisement, de la faim et du manque d’air dans les wagons, certains détenus étaient devenus fous et en étaient venus aux mains. Dans son wagon, on dénombra ainsi 60 morts à l’arrivée en gare de Dachau. Rescapé du Train de la Mort puis du camp de concentration de Dachau, où le typhus, le manque de sommeil et de nourriture continuaient d’emporter ses camarades, Jean a mesuré sa chance d’en revenir vivant, mais aussi d’avoir pleinement recouvré la santé après la libération. Marié à Estelle, qui l’accompagnait encore ce jour-là, ils vivent heureux depuis plus de 70 ans.

Quant à André Gaillard, il a souhaité rendre hommage à trois de ses bons amis de Compiègne : Guillaume d’Ussel, Marc Gervais et Jean Sordet, survivants eux aussi du terrible voyage débuté le 2 juillet 44. Guillaume d’Ussel mourut d’épuisement fin 1944 à Neckargerach. Marc Gervais, qui avait lui aussi été transféré à Neckargerach depuis Dachau, fut par la suite envoyé dans un autre camp, celui de Vaihingen, où il perdit la vie. Ce camp est une évocation terrible pour les déportés car, sur la centaine de détenus qui y fut transférée en décembre 44, moins de 10 en sont revenus vivants. Enfin, André Gaillard nous a parlé de Jean Sordet (dont le fils Guillaume se trouvait parmi nous ce jour-là), qui survécut à l’enfer des camps et put assister à la libération, mais qui décéda quelque temps après.

C’est ensuite Danièle Meyer qui est intervenue pour nous lire un petit mot de son père, Yves Meyer, autre déporté du Train de la Mort. Toujours fidèle à notre cérémonie annuelle, Yves Meyer n’a malheureusement pas pu se joindre à nous cette fois-ci pour raisons de santé, mais tenait à s’en excuser, nous accompagner par la pensée et nous assurer de son amitié.

Enfin, Dominique Boueilh a repris la parole pour inviter Joëlle Boursier – fille du général André Delpech, survivant de ce convoi de la mort et ancien président de l’Amicale de Dachau – à procéder au dépôt de gerbe. Joëlle a déposé la gerbe en compagnie d’Anne, sa petite-fille âgée de 8 ans. Elles étaient suivies de Dominique Boueilh et de madame Véronique Peaucelle-Delelis, directrice générale de l’ONACVG, qui nous a fait l’honneur, pour la deuxième année consécutive, de répondre favorablement à notre invitation. Nous avons ensuite observé quelques minutes de silence, puis avons entonné le Chant des Marais pour clore cette cérémonie.

Dominique Boueilh, Joëlle Boursier et Anne.

La cérémonie terminée, nous nous sommes attardés quelque temps dans les salles supérieures du Mémorial, afin de profiter du parcours pédagogique récemment enrichi. Puis, nous avons quitté les lieux pour nous rendre tous ensemble dans la salle où nous avons organisé notre cocktail déjeunatoire et tenu notre Assemblée Générale annuelle.

Alicia GENIN

Cérémonies du 8 mai 2022

Les délégués régionaux de notre Amicale étaient également présents aux cérémonies du 8 mai organisées sur l’ensemble du territoire français. Pour certains d’entre eux, comme Michèle Jubeau-Denis et Dany Périssé, ces commémorations ont offert l’opportunité de présenter notre exposition Dachau. Pour d’autres, elles ont été l’occasion de rendre hommage à des héros de la Seconde Guerre mondiale. Ainsi, notons par exemple que la commune de Batilly, en Meurthe-et-Moselle, a honoré ce 8 mai un couple de passeurs, Paul et Hélène Soine, en apposant une plaque commémorative sur le mur de l’ancienne poste, aujourd’hui bâtiment communal.

Les époux Soine sont les grands oncle et tante de Danielle Quentin et Jacky Guillaume, tous deux membres de notre Amicale. Venus d’Angers en famille, ils ont été invités à dévoiler la plaque devant une nombreuse assistance, des élus locaux, des enfants des écoles, des sapeurs-pompiers, et une fanfare qui fit résonner l’hymne national et le chant des partisans, avant de clore la cérémonie. Il y a quelques années, le bulletin de l’Amicale avait relaté l’engagement de ces personnes. Aujourd’hui, leur dévouement est gravé à jamais dans le marbre.

Et pour terminer cet article, quelques photos de la cérémonie de Paris, en présence du président de la République :

Ravivage de la Flamme sous l’Arc de Triomphe – 29 avril 2022

Comme chaque année, un petit groupe de représentants de l’Amicale était présent le 29 avril sous l’Arc de Triomphe pour la cérémonie du Ravivage de la Flamme, marquant cette fois le 77e anniversaire de la libération du camp de Dachau.

Wilfried Quentin, notre porte-drapeau, aux côtés de Pierre Schillio, notre Secrétaire Général depuis 49 ans.
Pierre Schillio est entouré de son fils Pascal et de Catherine Regnier pour déposer la gerbe de l’Amicale.
Des membres de l’Amicale sous l’Arc de Triomphe.